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Sujet de philo


Chloe0123

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C'est toute la question de ce qu'on appelle la loi naturelle. L'article de Wiki sur le sujet est approximatif et même en partie erroné. Va plutôt voir http://www.philagora.net/philo-bac/loi-naturelle-1.php en n'oubliant pas de regarder toutes les pages.

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  • E-Bahut
Il y a 8 heures, Chloe0123 a dit :

Bonjour je dois effectuer cette dissertation, mais j’arrive pas à comprendre.

vois-ci la question « peut-on se référer à la nature pour justifier nos conduites humaines ? »

Puisque tu as du mal à comprendre la question, laisse-moi clarifier par des exemples. Pense aux petits vieux ou aux crétins de la manif pour tous qui disent que "l'homosexualité n'est pas naturelle". Que veulent-ils dire par là, exactement?

Que l'homosexualité n'existerait pas dans la nature? Auquel cas, ils sont très mal renseignés, non? N'importe quel éthologue sait que l'homosexualité existe chez de très nombreux animaux. Ce serait un argument par analogie au monde naturel (un très mauvais dans ce cas précis).

Ou si on reprend le slogan de la manif pour tous les homophobes: "Nous sommes tous des enfants d'hétéro", ce qui sous-entend un argument qui se veut logique, l'homosexualité serait une contre-nature, une aberration naturelle comme un sixième doigt ou une maladie génétique rare, puisqu'ils ne peuvent pas se reproduire. Auquel cas, c'est bien mal comprendre les mécanismes du vivant, puisque l'instinct sexuel ne sert pas qu'à la reproduction, il a de multiples rôles (pacification du groupe, par exemple) et poser la question à un éthologue suffirait pour comprendre que si l'homosexualité est effectivement stérile, elle réapparaît tout de même très fréquemment chez beaucoup d'animaux à chaque génération. Cet argument, qui se veut logique (l'homosexualité est stérile, donc c'est une aberration) relève donc du sophisme de la part de gens qui ont passé très peu de temps, voire pas du tout, à questionner la sexualité dans la nature.

Mais ils veulent peut-être dire que l'homosexualité est contraire à la nature humaine profonde? Que l'homme, dans sa nature, c'est-à-dire ici son essence, doit être hétérosexuelle. Là, ce n'est plus un argument scientifique, mais métaphysique: le mot "nature" est utilisé comme une métaphore de l'essence philosophique qu'on attend d'un être humain. Auquel cas, c'est un parti pris essentialiste: il faut s'accorder sur la nature humaine... ça demande un sacré boulot philosophique en amont, de dire "un homme doit être comme ça, c'est tout"... ou juste beaucoup d'orgueil et quelques préjugés.

Mais au final, imaginons que certains de ces arguments soient vrais: et si on vivait effectivement dans un monde où l'homosexualité est une mutation génétique handicapante, mais pas si rare que ça, un peu comme la trisomie 21? La question qu'on te pose est: peut-on utiliser cette connaissance médicale sur la génétique humaine pour justifier un certain comportement? Est-ce que la question de tolérer l'homosexualité est forcément une question de rapport à la nature? Est-ce que ce ne serait pas une question morale, politique, légale (en France, l'homosexualité n'est plus considérée comme une maladie mentale depuis seulement 1992).

Et d'ailleurs, que nous dit vraiment la science sur le sujet? Puis que peut-on en déduire? Si des études génétiques poussées, contrôlées, relues par les pairs et validées par d'autres études ou méta-études nous disaient "oui, ok, on a isolé la mutation responsable de l'homosexualité, c'est une mutation récurrente" (pure hypothèse, ce n'est pas ce que je pense et j'imagine pour l'exemple), est-ce qu'on doit forcément la considérer comme une nuisance? La science peut décrire un phénomène, l'inscrire dans un cadre théorique, bref: l'expliquer. Mais la science ne dit pas ce qu'on doit en faire ensuite. Quelle que soit la décision qu'on prend après avoir lu ces études dans mon exemple, la décision d'après n'est pas scientifique: elle est politique. On pourrait pencher pour "ok, donc c'est une maladie génétique, il faut développer une thérapie pour guérir ces malades", ou pour "ces gens sont nés comme ça et la société doit s'y adapter".

La nature est donc facilement très, très loin dans les choix politiques. D'ailleurs, faisons une rapide liste non-exhaustive de comportements qu'on peut juger "contre-nature":

- Je veux des enfants avec ma femme, mais je commence ma carrière et elle termine ses études, avoir un enfant avant deux ou trois ans saboterait nos futures carrières. Du coup elle prend la pilule (ou je mets des capotes, ou un implant chimique, ou elle met un stérilet, etc...) Contre-nature!

- Une soeur catholique de 22 ans, en bonne santé et fertile, pleine de désirs pour ses anciens amis de lycée, fais une croix sur sa libido au nom de sa foi religieuse: elle fait voeux de chasteté au couvent. Contre-nature!

- Mon grand-père a un début de cataracte, il se fait opérer et un chirurgien ophtalmologiste lui ouvre l'oeil pour y placer un implant synthétique qui remplacera son cristallin naturel usé. Contre-nature!

- Ta mère se teint les cheveux parce qu'elle a honte de vieillir: contre-nature.

- J'ai faim, mais au lieu de réunir mes cousins pour partir à la chasse avec des lances et des sagaies, je vais acheter un steak issu d'une ferme d'élevage où les vaches ne peuvent pas bouger et sont gavées d'antibiotiques. Je paie à une caisse automatique parce que je n'aime pas les caissières, avec ma carte bancaire sans-contact pour aller plus vite. On est d'accord qu'on peut hurler "contre-nature!" douze fois en lisant la phrase précédente?

 

 

Donc, résumons-nous pour conclure: "peut-on se référer à la nature pour justifier nos conduites humaines?"

Et bien certains le font, en prétendant par exemple que l'homosexualité est contre-nature, ou que les médicaments à base de plante sont forcément plus naturels, donc meilleurs que les médicaments produits par synthèse chimique (ce qui n'est pas vrai, on peut vérifier...) Le plus souvent cependant, il s'agit d'un simple sophisme d'appel à la nature.

Certains diront au contraire que les conduites humaines s'opposent au cours naturel des choses et que c'est justement tout l'intérêt d'être humain. Notre culture peut faire le choix de la contre-nature: on peut soigner nos malades au lieu de les laisser mourir, prendre soin des handicapés au lieu de les laisser aux prédateurs, allumer un feu au lieu de mourir de froid en hiver, réguler les naissances par des lois ou des contraceptifs, distribuer des vaccins, pratiquer des opérations pour extraire des tumeurs... Je continue?

Et on peut aussi considérer qu'il y a un immense travail philosophique de définition à fournir pour ne pas se planter. Quelle nature? Les créationnistes et les scientifiques darwiniens ne parlent visiblement pas de la même chose lorsqu'ils se prononcent sur la "nature" de l'humain. Et il y a un travail moral et politique à faire ensuite, quelles que soient les conclusions éclairées que nous fournissent les scientifiques grâce à leurs recherches. Si les épidémies sélectionnent les gens les plus résistants en tuant beaucoup de monde, faut-il laisser crever des millions de personnes au nom de la nature, ou faut-il faire un choix contre-nature en distribuant des vaccins?

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