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Le Léviathan (non pas le monstre mais T. Hobbes)


Girodo45

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Bonjour,

 

J'ai une explication de texte de Hobbes à rendre pendant les vacances, je crois comprendre le texte mais j'ai (toujours) du mal à construire une problématique. Je parviens à expliquer un texte sans pour autant formuler un projet de lecture. Pourriez vous m'éclairer? Voici le texte:

 

C'est au souverain qu'appartient le soin de faire de bonnes lois. Mais qu'est-ce qu'une bonne loi ? Par bonne loi, je n'entends pas une loi juste, car aucune loi ne peut être injuste. La loi est faite par le pouvoir souverain, et tout ce qui est fait par ce pouvoir est autorisé et reconnu comme sien par chaque membre du peuple; et ce qui arrivera de cette façon à tout homme, personne ne peut le dire injuste. Il en est des lois de la République comme des lois des jeux : tout ce sur quoi les joueurs s'accor­dent tous n'est injustice pour aucun d'eux. Une bonne loi est celle qui est nécessaire pour le bien du peuple et en même temps claire.

En effet, l'utilité des lois (qui ne sont que des règles autorisées ) n'est pas d'em­pêcher les gens de faire toute action volontaire, mais de les diriger et de les maintenir dans un mouvement tel qu'ils ne se fassent pas de mal par l'impétuosité de leurs propres désirs, par leur imprudence et leur manque de discernement, comme des haies sont installées, non pour arrêter les voyageurs, mais pour les maintenir dans le droit chemin. Et c'est pourquoi une loi qui n'est pas nécessaire, n'ayant pas la véritable finalité d'une loi, n'est pas une bonne loi. On pourrait imaginer qu'une loi est bonne quand elle est faite pour l'avantage du souverain, quoiqu'elle ne soit pas nécessaire au peuple, mais il n'en va pas ainsi, car le bien du souverain et le bien du peuple ne peuvent être séparés. C'est un souverain faible que celui qui a des sujets faibles, et c'est un peuple faible que celui dont le souverain n'a pas le pouvoir de régir les sujets selon sa volonté. Des lois qui ne sont pas nécessaires ne sont pas de bonnes lois, mais des pièges pour récupérer de l'argent, qui sont superflus là où le droit du pouvoir souverain est reconnu, et qui sont insuffisants pour défendre le peuple là où il ne l'est pas.

 

Dans ce texte, Hobbes s'efforce de répondre à la question suivante: qu'est-ce qu'une bonne loi? D' abord il donne une définition négative qui corrige un lieu commun: une bonne loi n'est pas une loi juste. Tout simplment parce qu'il ne saurait y avoir de lois injustes. En effet, dans l'état civil, les lois sont faites par les hommes, pour servir les hommes. Autrement dit les hommes ont reconnu la légitimité de ces lois. Dire que bonne loi=loi juste ce serait donner une définition insuffisante puisque les lois de l'état civil sont nécessairement justes. Dans un second temps, Hobbes donne pour défintion de la bonne loi le critère de la nécessité. Nécessité renvoie au besoin. Quelle est la finalité de la bonne loi? Non pas d'empêcher les gens (la loi n'est pas une privation de la liberté) mais de rendre possible leur désirs. Une bonne loi doit servir le peuple, non pas uniquement le souverain. Dire que la loi servivrait le souverain sans servivr le peuple est une absurdité selon hobbes, le souverain n'existe que par le peuple. Ce que le souverain veut, le peuple veut.

J'ai un peu de mal à comprendre la fin, la faiblesse etc. Mais il me semble que puisque le peuple et le souverain sont inséparables, affaiblir le peuple, ce serait pour le souverain s'affaiblir lui- même.

Bref, chez Hobbes, ce qui a de bien c'est que tout se tient. Il suffit de rentrer dans son système, de reprendre ses définitions et de reconstruire l'édifice. Où est la tension?

 

Merci d'avance our votre aide

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  • E-Bahut

Il y a beaucoup de choses dans ce petit  texte. J'aime beaucoup Thomas Hobbes et j'ai pas mal planché sur le Léviathan durant mes études.

Pour faire court: tu n'as aucun mal à identifier la problématique, puisqu'elle est donnée par le texte: qu'est-ce qu'une bonne loi?

Mais la difficulté du texte vient du nombre de distinctions opérées en peu de temps.

D'abord, il distingue la bonne loi de la loi juste (tu le signales comme étant la correction d'un lieu commun, je dirais plutôt que Hobbes établit une distinction conceptuelle entre les deux en neutralisant l'idée de loi injuste à sa manière: en laissant la charge au souverain).

Mais ensuite, pour neutraliser l'idée de "loi injuste", il se lance dans une analogie entre une loi et une règle d'un jeu de société (ce qui indique à quel point Hobbes est dans l'idée qu'on adhère à la société, comme un joueur vient à la table de jeu de son plein gré... Un sociologue moderne aurait beaucoup de choses à dire à Hobbes sur les gens contraints de rester dans une société). Cette analogie doit être un peu commentée.

Puis il se lance dans une explication qui, apparemment, te pose problème: la loi bonne ne peut pas être celle qui avantage le souverain sans être nécessaire au peuple. C'est-à-dire que le souverain est, pour Hobbes, soudé à sa fonction de serviteur du peuple : ils ne peuvent pas avoir d'intérêts divergents.

A ce niveau, il faut se poser la question: à qui s'adresse ce texte? Pas au grand public, car à l'époque la majorité de la population travaille la terre et ne lit pas. Les livres de l'époque s'adressent au gens de culture, donc de pouvoir. C'est un conseil politique glissé aux gens qui veulent gouverner: vous ne devez pas séparer votre intérêt de celui du peuple.

La phrase sur la faiblesse est un double avertissement: un roi qui affaiblit son peuple (en le privant de liberté) est aussi un roi faible. Et un peuple est faible si on ne peut pas appliquer les lois. Pour illustrer l'idée de loi qui n'est pas nécessaire au peuple, il parle d'un "piège pour récupérer de l'argent": Hobbes nous parle de droit fiscal et met en garde les politiques contre des taxes abusives (si si, pas de quoi en faire un gilet jaune, mais tout de même, l'avertissement est bien là). Autrement dit, Hobbes s'inscrit dans une tradition libérale (la loi n'est pas une privation), qui se prononce pour un pouvoir fort, une autorité qui peut s'imposer au peuple, mais qui doit toujours rester au service de l'intérêt général. Hobbes est un peu antérieur au Lumières, mais il préfigure beaucoup de leurs idées (parce que les lumières se sont beaucoup inspirées de lui, notamment Rousseau qui reprend beaucoup au Léviathan dans son Contrat social).

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Merci beaucoup.

J'ai pu résoudre mes difficultés en relisant et relisant le texte mais au moins j'ai la confirmation que ce que j'ai pu commenter est juste.

J'ai fait référence à plusieurs reprises à l'oeuvre de Rousseau (Du Contrat social). Je m'étonne toujours de voir à quel point Rousseau doit à Hobbes. Il le critique et pourtant il en est assez proche (même si Rousseau reste proche d' Aristote contrairement à Hobbes).

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