Fiona766 Posté(e) le 26 novembre 2007 Signaler Share Posté(e) le 26 novembre 2007 Bonjour, Ce texte est un peu long à lire, mais si vous pouviez le lire et ajouter vos corrections ou idées. N'hésitez pas. Merci d'avance. Fiona. Internet et livre : le devenir du savoir « Internet n’est rien de plus qu’un immense dictionnaire, un gigantesque espace dans lequel le corps se déplace » Michel Serres Il est question depuis un certain temps de faire référence à « un corps de savoir ». Au sein de ce corps, le livre était un moyen de transmettre le savoir. Avec le surgissement d’internet, ce corps a été dépouillé de son privilège, changeant la manière dont le savoir est transmis et remettant en question nos sources de connaissances. Étant donné l’influence d’internet, il ne convient plus de parler d’un corps de savoir sustenté seulement par le livre. Comment décrire la nature contemporaine du savoir? Considérons que le savoir ressemble à un continuum où se trouve une configuration d’idées. Un continuum, concept philosophico-mathématique, désigne un espace qui n’est pas interrompu, qui n’est pas limité, un ensemble d'éléments tels que l'on peut passer de l'un à l'autre de façon continue. Si on adopte la métaphore d’un continuum par rapport au savoir, quelles sont les caractéristiques de ces deux sources particulières, internet et livre, qui y fluent et refluent? En premier lieu, il faut examiner les points communs entre internet et livre, un moyen de partager des idées à base de texte, qui, dès leur diffusion, avaient eu un effet révolutionaire sur l’échange de savoir. Ensuite, leurs différences en termes de but, lucratif ou non-lucratif, et de contenu, géré par un intermédiare ou survenant d’une source primaire . En dernier lieu, où en sommes-nous dans le continuum? Similaire en nature, le livre et internet sont un moyen de communication linguistique qui sont à base de texte, un moyen de partager des idées. On parle beaucoup en ce moment de la fiabilité de certains sites internets. Il arrive bien sûr qu’il y ait des sources peu fiables sur internet . Il en est de même pour des livres. On doit lire avec discernement également un livre ou le contenu d’un site internet pour juger de leur crédibilité. Bref, il faut un esprit critique. Tout de même, tant de sources sur internet sont pareilles à celles qui se trouvent dans une bibliothèque publique, des œuvres littéraires, des textes scientifiques, des ouvrages de référence. De plus, pour mieux communiquer des idées au destinataire un site internet a des caractéristiques semblables à la forme d’un livre, tous les éléments qui nous aident à comprendre le contenu: la page d'accueil est comparable à la page de titre, le sommaire de contenu d’un site internet imite l’extrait au verso, le menu déroulant équivaut à la table de matières. Étant donné leurs affinités, le livre et l’internet ont aussi intensifié l’échange des idées dès leur diffusion à grande échelle. De façon analogue, la diffusion du livre et d’internet a entraîné des répercussions inattendues dans l’échange du savoir. L’invention de La presse de Gutenberg a donné au peuple accès à une source de savoir, le livre, jadis indisponible à tous. À la suite de l’apparition de la presse du Gutenberg, l’alphabétisme s’est répandu dans la société occidentale. Ceci a produit un effet révolutionnaire : l’expansion de la presse d’imprimerie a accordé aux diverses classes sociales le moyen de propager ses idées. Il en résulte que la diffusion du livre a engendré un décalage fondamental de la concentration de savoir et de pouvoir. Selon le philosophe français, Michel Serres, l’avènement d’internet ressemble à l’essor du livre : « C’est une nouveauté aussi grande qu’à l’époque de l’imprimerie où le savoir n’était qu’à la disposition de très peu de personnes. Mais il est allé à ceux qui pouvaient se payer les livres. Maintenant, il va à tous… » (La rédemption du savoir, L’encyclopédie de l’Agora). En d’autres termes, l’internet a donné le moyen de se renseigner dans une vaste bibliothèque virtuelle où des sources viennent de partout, d’autant plus important à un moment où les gros médias et des maisons d’éditions dirigent ce qu’ils mettent en évidence. Rupert Murdoch, grand chef d’un empire des médias, News Corporation, a fait la même comparaison à l’égard de la diffusion du livre et l’internet et comment cet accès au savoir a donné au peuple le pouvoir. « Trouver quelque chose de comparable, il faut remonter cinq cents ans à la presse d’imprimerie, la naissance des médias - effectivement, cela a détruit le vieux monde, les rois et l’aristocratie. La technologie déplace le pouvoir des mains des rédacteurs, des éditeurs, le pouvoir établi, l’élite des médias. Maintenant, c’est le peuple qui prend le dessus. » (Spencer Reiss. Wired. His Space. juillet 2006) Dans le but d’établir une présence majeure sur internet, Murdoch a dépensé $1,5 milliards de dollars en achetant des «communautés en ligne» comme celles des maisons de jeu et MySpace, peut-être aussi dans le but de faire diversion. Rappelons la maxime « Savoir, c'est pouvoir ». Donc, on se demande si ce qui est en jeu est le flux de savoir. Dans quelle manière diffèrent-ils, livre et internet, comme source de savoir? Ayant dit que le livre et internet avaient les affinités comme source de savoir, ils ont aussi des différences en termes de but et de contenu. La plupart du temps le livre est vendu à but lucratif et le contenu est bien choisi. Dans les magasins de grande surface, on a l’embarras du choix. En outre, on fait confiance aux maisons d’éditions bien connues pour vérifier les compétences de l’auteur ou des auteurs d’un texte. Pourtant, des maisons d’éditions ont le pouvoir de rejeter des manuscrits. Par contre, l’internet diverge du monde des maisons d’éditions en donnant accès aux sites internets à but non- lucratif qui sont nés d’un désir de partager du savoir. Cela arrive que des scientifiques, des écrivains et des philosophes qui posent des questions réelles soient poussés en marge sous la pression des intérêts commerciaux ou politiques. «Où se trouve des sources fiables dans le cas où on se doute de l’influence des intérêts commerciaux? » Prenons à titre d’exemple le debat sur le changement climatique. Ça se peut que des intérêts pétroliers aient eu une influence majeure en mettant en marge le consensus sur le changement climatique. Il faut reconnaître que ce debat a été conclu aux cercles scientifiques il y a quelques années. La majorité étaient d’accord. Cela arrivait. Cependant, pour bien se renseigner à ce sujet au cours des années il était nécessaire de consulter diverses sources au-delà du courant principal, effectivement celles qui se trouvaient sur internet. À présent, l’internet demeure hors d’atteinte des intérêts commerciaux. Grâce à sa qualité d’interactivité, l’internet engendre un moyen alternatif de partager le savoir sans l’ingérence des intérêts commerciaux. Pour éviter des éditeurs commerciaux et faciliter un échange de savoir de plus en plus de scientifiques préfèrent se servir d’un processus qui s’appelle « Eprints » ou « prépublications », expliqué ci- dessous : « Le terme "prépublications" désigne des articles acceptés pour parution dans des revues à comités de lecture ou des articles n'ayant pas été validés par des pairs. Il peut aussi s'agir de rapports scientifiques et techniques. Ce mode de publication se répand de plus en plus dans la communauté scientifique pour pallier d'une part aux délais de parution des périodiques et d'autre part pour contourner l'inflation du marché des périodiques scientifiques détenus par les éditeurs commerciaux. » (citation tirée d’un Guide des indispensables de la recherche dans Internet, site internet de l’Université Laval) Ce processus a eu pour conséquence de donner à tous accès à ces recherches et de fournir un espace où des savants peuvent entretenir un dialogue. Dans une étude effectuée par l’Institut de la Communication et des Médias, Université Stendhal Grenoble en 2000, l’auteur Nathalie Pignard souligne le rapport entre communication et recherche en faisant référence à des paroles livrées par Frédérico Mayor pendant une conférence au sujet des prépublications en 1996 à Paris : « La science n'est rien si elle ne communique pas. Sans l'échange régulier d'idées et la mise au banc d'essai des raisonnements, hypothèses et théories, il ne peut y avoir ni développement de la pensée scientifique, ni avancées de la recherche. » (Les nouvelles formes de publication scientifique sur Internet.) On peut citer à cet effet le cas du mathématicien russe, Grigori Perelman. Cet exemple montre comment cette forme de publication se déroule sur internet et facilite un échange du savoir. En novembre 2002 Perelman a affiché un eprint (forme numérique) à arXiv.org, un site-web de prepublication. C’était un eprint premier, il y en aurait trois, fournissant une preuve mathématique de la conjecture de Poincaré non résolue depuis une centaine d’années. « Mon raisonnement était ainsi: si je faisais une erreur et quelqu’un d’autre pouvait utiliser mon travail de construire une preuve juste, je serais content. Je n’avais pas l’intention d’être la seule personne à résoudre Poincaré, » il a dit plus tard. (David Gruber. Sylvia Nasar. The New Yorker. Annals of Mathematics. Manifold Destiny: a legendary problem and the battle over who solved it). Au cours de cinq années d’autres mathématiciens ont travaillé sur des preuves complètes et en juillet 2006 John Morgan et Gang Tian ont affiché une preuve détaillée de celle de Perelman à arXiv.org. Reconnu pour avoir résout cette conjecture, Perelman a été nommé lauréat de la médaille Fields en mai 2006, honneur prestigieux pour un mathématicien. Au fait, il ne l’a pas acceptée disant que cela lui suffit d’avoir réglé cette question. En décembre 2006, la publication Science Magazine a qualifié la preuve de Perelman comme la plus grande découverte scientifique de l’année. Certes, c’est un cas exceptionel. Pourtant, cela indique le niveau de la recherche contemporaine variée qui est disponible sur les sites internets de prépublication. Pour conclure, la différence entre internet et livre est que la nature du savoir sur internet se manifeste souvent en forme d’un dialogue contemporain, disponible à tous ceux qui ont accès, dans un espace hétéroclite qui n’est pas encore dirigé par un pouvoir autoritaire. Revenons à la question « quelles sont les caractéristiques de ces deux sources de savoir, internet et livre? » Je propose que, par rapport à une source de savoir, le livre et internet se complètent. Ce sont les mêmes internautes qui ont entraîné des répercussions bénéfiques à l’égard des ventes de livres. On cherche des librairies en ligne pour trouver un bon livre. On contribue à des discussions ou des critiques de livre sur internet. On crée des sites internets. L’internet possède cette qualité d’interactivité, ce dialogue entre des gens qui engendre des idées. Au lieu de parler d’un corps de savoir, concept fixe, on a vu que le savoir a une nature évolutive comparable à un continuum où tant de sources se croisent. Alors, où en sommes-nous dans le continuum? Pour ceux qui veulent restreindre l’internet, il faut dire qu’on risque de passer sous le joug. Le flux de savoir ne doit pas être dirigé. En fin de compte, d’où vient le savoir, internet ou livre? À vrai dire, il vient de l’imagination collective du peuple rappelant ce que Albert Einstein a dit « L’imagination est plus importante que le savoir ». Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
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