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Philo bac 2022: sujets analysés, pistes de corrigés


Calliclès

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  • E-Bahut

Voici ce qui est tombé aujourd'hui pour les bacheliers 2022 du bac général:

Sujet 1 : Les pratiques artistiques transforment-elles le monde ?

Sujet 2 : Revient-il à l’Etat de décider de ce qui est juste ?

 

Sujet 1: Les pratiques artistiques transforment-elles le monde ?

La notion d'art a été remplacée par "pratiques artistiques" pour plus d'ouverture, peut-être. Rappelons que beaucoup de civilisations n'ont pas de mot pour "art".

C'est une question qui ressemble énormément aux sujets bidons de français qu'on connait bien: "l'artiste peut-il changer la société?" et autres conneries. Mais puisqu'on est en philo, cette fois-ci on va pouvoir réfléchir et donner une réponse sensée au lieu de citer Zola et Victor Hugo.

Sous des dehors modernes, c'est la question bien classique de l'utilité de l'art qui vous est posée.

Le problème: l'art parle de la société, le commente et transmet une image durable de cette vision sociale de l'artiste, et pourtant ce n'est absolument pas son rôle de changer la société. Bref, les pratiques artistiques ne sont pas de la politique, donc l'art serait un éternel commentateur inutile... et pourtant, la politique utilise l'art, sa puissance évocatrice, et peut même censurer des pratiques artistiques en fonction des tendances. Si votre problématique s'articule autour d'art et politique: c'est gagné. Si vous posez plus largement la question de l'utilité de l'art, avec au moins une partie de la dissertation consacrée à l'impact politique de l'art, c'est gagné.

Les exemples: Si vous avez parlé de propagande, d'art fasciste, ou encore de critique politique par l'art, vous avez probablement gagné des points. On peut citer l'affiche rouge pendant la seconde guerre mondiale, la censure de l'art expressionniste par les nazis, on peut éventuellement parler de la critique de l'art par Platon (pas forcément pertinent, à utiliser à vos risques et périls). Et puisqu'on parle du "monde", qui n'est pas la notion la plus réduite en philosophie, il est possible de parler d'autres choses. Remplacer le mot "art" par "pratiques artistiques" permet de parler de la pub, de la propagande bien sûr, mais aussi, pourquoi pas: de l'art-thérapie. Ces exemples n'étaient pas hors-sujet, si vous les avez connecté à votre problématique. Une éventuelle sous-partie sur la gratuité de l'art, et sa nécessité d'être décorrélé du monde pour durer en tant qu'oeuvre, aurait sa place dans l'antithèse, si vous êtes chauds pour citer les dadaïstes et autres surréalistes.

Les hors-sujets: Si vous avez commencé à dérouler de longs arguments pas toujours clairs sur l'état du monde, la guerre et le réchauffement climatique, en oubliant les pratiques artistiques, c'est perdu. Même chose si vous avez centré votre dissertation sur l'art pur sans jamais parler de politique ou d'applications pratiques de l'art, vous êtes en hors-piste sans combinaison.

 

Sujet 2: Revient-il à l’Etat de décider de ce qui est juste ?

Inévitable sujet politique pour une année électorale!

L'Etat, vous vous souvenez de vos cours? Machiavel, Hobbes, Arendt, emballez, c'est pesé: il va falloir définir l'Etat. Puisque ce sujet parle d'Etat et de justice, vous devez définir les termes. Il est possible d'utiliser des notions connexes, comme la morale, à condition de ne pas centrer sa dissertation dessus et de les utiliser dans des parties ou sous-parties spécifiquement consacrée à l'exploration de ce rapport.

Le problème: N'oubliez pas que vous devez surtout trancher la question suivante: qui décide de ce qui est juste? Si l'Etat décide, un chef d'Etat, ou ancien chef d'Etat ne peut jamais être jugé et il n'y a pas de justice (pas vrai, M. Sarkozy?) Si ce n'est pas l'Etat, on peut se demander qui? Les entreprises? La société civile? Les magistrats, bien sûr, c'est leur boulot. Parlez de la séparation des pouvoirs, mais aussi du rôle des institutions judiciaires. C'est une dissertation parfaite pour ceux qui s'intéressent au droit et à la politique. Il y a un paradoxe car la justice doit pouvoir juger des personnes d'Etat pour lutter contre la corruption, et l'Etat doit garantir la justice: pas simple! Si vous avez compris ce problème et que votre problématique connecte bien Etat et justice, sans abandonner un des termes, vous gagnez des points.

Les exemples: la corruption, les conflits d'intérêt, le rôle de l'Etat comme garant des institutions, la séparation des pouvoirs (oui, on peut citer Montesquieu et l'Esprit des lois, on DOIT citer Montesquieu), mais également les intuitions morales qui précèdent la justice, donc les théories morales que vous maîtrisez suffisamment pour les citer. Mais encore: une sous-partie questionnant le rôle de l'Etat, donc un petit rappel du contrat social (Hobbes ou Rousseau, au choix) peuvent être utiles. Si vous avez le bon goût de citer un théoricien de la justice, comme Rawls ou Beccaria, bravo, mais c'est délicat: attention à bien rester dans votre problématique.

Les hors-sujets: Si vous êtes parti en roue libre sur une loooooooongue définition de l'Etat, en oubliant le rapport à la justice pendant une partie entière, j'ai de mauvaises nouvelles... L'inverse n'est pas tout à fait vrai: si vous parlez de justice seule pendant une partie entière, mais en gardant en tête le "qui décide?", vous êtes dans les clous. Par contre, si vous êtes partis sur des propos de comptoir, du genre: "de toute façon, les politiques ne vont jamais en prison, alors c'est pas juste et c'est comme ça", sans poser de question, alors vous n'avez pas écrit de propos philosophiques, vous avez juste confondu l'épreuve du bac avec une discussion de vieux alcoolisés dans un bar PMU.

 

 

Sujet 3: Extrait d'un texte de Cournot.

C'est un très beau texte d'épistémologie, donc de philosophie de la connaissance. Si vous avez casé le mot "épistémologie" dès l'intro, vous commencez à gagner des points.

Le thème: Ce texte parle de la définition d'une expérience scientifique, et en quoi elle diffère d'une observation strictement intérieure, sur les états mentaux.

La thèse: C'est la première phrase, précisant qu'une observation est scientifique si l'on défini précisément les conditions auxquelles on peut la reproduire.

Le problème: Qu'est-ce qu'une observation scientifique? Le problème plus vaste est la légitimité de la science, sa spécificité par rapport à d'autres observations.

L'enjeu: C'est la définition de la science elle-même qui se joue dans ce texte. En donnant un critère de scientificité aussi précis, Cournot nous renseigne sur un aspect fondamental de l'expérience scientifique: son indépendance de l'observateur, et nous met en garde contre des expériences que personne ne pourrait reproduire.

Modifié par Calliclès
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