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L'hypocrisie


joey

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Bonjour ! Silvouplait ! Pouvez-vous me donner les points négatifs de l'hypocrisie car en ce moment j'étudie Dom juan qui lui en fait un éloge. Cela me sera d'une grande aide pour pouvoir faire une rédaction.

Merci d'avance pour votre aide !

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  • E-Bahut

Qu'est ce que la sincerite

Vous vous souvenez que je m'étais appuyé sur les travaux du sinologue François Jullien. Il raconte notamment qu'il a dû conseiller les dirigeants de grands groupes industriels français qui ne cessaient de se " faire avoir ", si vous me passez une expression aussi familière, par leurs clients chinois. Alors que les premiers considéraient la signature du contrat comme l'acte à la fois final et décisif de la négociation, les seconds, une fois le contrat signé, apportaient plus ou moins subrepticement à la situation sur le terrain des changements tels que les clauses en devenaient finalement inapplicables. Moi, comme vous je suppose, je me dis que des gens qui agissent ainsi n'ont pas de parole (car un homme de parole respecte aussi bien l'esprit que la lettre de ses engagements), voire sont tout simplement des crapules. Je crois me souvenir qu'une telle idée lui est venue, à lui aussi, puisqu'il la dénie dans le récit qu'il fait en insistant ensuite sur les différences essentielles entre les mentalités chinoises et européennes, puis en montrant que cette manière d'agir est littéralement normale dans cette civilisation. Que le monde des affaires ne soit pas rempli d'enfants de chœur, tout le monde le sait, et personne n'ignore que le respect de la parole donnée y est souvent conditionné par le caractère juridiquement contraignant des obligations et par la peur des conséquences induites par d'éventuels manquements. Mais enfin, même en reconnaissant que le monde des affaires est misérable c'est-à-dire trivial, sans conscience et sans âme (ce qui n'est d'ailleurs pas absolument vrai, car il doit bien supposer un minimum de confiance subjective), personne d'entre nous n'aurait l'idée de trouver " normale " une manière d'agir comme celle que je viens de mentionner : les plus cyniques, disant que la mauvaise foi ou la tromperie sont des armes nécessaires dans cette jungle, reconnaîtront par là même leur immoralité de principe. Donc ou bien on considère que la civilisation chinoise dans son ensemble est une civilisation d'hypocrites, ou bien on reconnaît que la notion de sincérité, telle du moins que nous l'entendons habituellement (disposition consciente), est occidentale.

...

Donc si vous accordez à Foucault la notion d'" histoire de la vérité " ..., vous reconnaissez la contingence historique de la sincérité... Car concrètement, cette figure dont Saint Augustin, Montaigne, Pascal, Rousseau et Sartre sont les grands moments de définition a été littéralement fabriquée par l'Eglise. De fait, son histoire renvoie à tout une pastorale du péché : c'est l'Eglise et sa pratique des confessions qui produit la sincérité en forçant les croyants à débusquer toujours plus précisément le péché en eux-mêmes, là où il n'y avait que la conscience de vivre, et en les convaincant que ce péché devait forcément exister, puisque l'homme est originellement pécheur (de sorte que si on ne le trouve pas c'est simplement qu'on a mal cherché !). ...

...

Et puis surtout c'est évident dès qu'on parle de religion. Beaucoup d'entre nous se disent croyants, et s'imaginent l'être " sincèrement ". Je prends simplement l'exemple de ceux qui se disent chrétiens, puisque c'est la religion qui m'est la plus familière : combien d'entre eux sont capables du minimum de références ? Je ne parle pas de subtilités théologiques mais vraiment du plus strict minimum : la simple récitation des dix commandements. Le résultat est sans appel, il me semble. Le cas du deuil est encore plus flagrant : ceux qui croient au paradis, à l'immortalité de l'âme, à la vie éternelle devraient se réjouir quand une personne qu'ils aiment quittent cette " vallée de larmes " ! Or, tout comme moi et comme vous, humainement donc, ils pleurent quand cela leur arrive et sont d'autant plus désespérés qu'ils aimaient plus la personne qui vient de mourir. Il y aurait quelque obscénité à leur dire de se réjouir ; et pourtant c'est ce qu'il faudrait faire, si l'on était dupe de leur profession de foi... Mais personne ne l'est, bien sûr. Le reste du temps, les " croyants " oublient très soigneusement d'examiner la valeur de leur " foi ", qui n'a de réalité subjective que comme trait d'appartenance sociale, comme tel constitutif de l'identité (d'ailleurs qui ne voit dans les différentes formes d'intégrisme la jouissance identitaire ?). Et puis je vous rappelle l'argument de Bergson, à la fin des deux sources : si les humains croyaient un tant soit peu à l'immortalité de l'âme qu'ils ne cessent pour la plupart de professer, ils ne se jetteraient pas comme ils le font sur le plaisir en ayant à chaque fois l'idée que c'est toujours cela de pris au néant !

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Ne sont sincères que ceux qui ont " lieu " de l'être, c'est-à-dire que ceux qui sont installés à la fois pour des raisons de civilisation, d'histoire et de places dans cette disposition de conscience. Mais bien entendu, ceux qui ont lieu de l'être (ce qui ne signifie pas qu'ils le sont) vivront cette nécessité comme universelle : l'impératif de la sincérité est inconditionnel et c'est à chaque fois une figure du mal qu'on rencontre dans sa transgression, par les autres et par soi-même (l'humanité tout entière est donc mauvaise, puisqu'il est impossible réellement sincère : tous les autres sont des hypocrites et l'on est soi-même une personne de mauvaise foi). Concrètement : les intellectuels et les religieux, les philosophes sont les seuls, dans l'idée que nous pouvons nous en faire a priori, à devoir l'être vraiment

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