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Bonjours, je dois faire le résumé de ce texte paragraphe par paragraphe , puis globalement pour vendredi cependant le sens de ce texte m'échappe pourriez vous m'aider s'il vous plait.

Merci d'avance.

Le héros est le don ambigu que nous accorde la littérature avant de prendre conscience

d’elle-même. De là qu’il soit, malgré sa simplicité, partagé entre le dire et le faire.

D’abord, s’il appartient aux premiers temps, il n’appartient pas au temps le plus ancien.

Ce que les Allemands appellent das Märchen et que nous traduisons (mal) par conte, se

rapporte à un âge du monde sans héros et presque sans figure : alors, on ne fait pas attention

aux noms et, même nommé, le personnage prémythique ne se sépare pas des

puissances sensibles — l’eau, la terre, les plantes — que suffisent à désigner des mots

communs. L’âge des contes n’est pas exempt d’êtres pervers ni de coups violents ; mais,

remarque Jünger, quand nous rencontrons des nains, des ogres, des sorciers, nous ne rencontrons

ni Siegfried ni Héraklès, et même le chasseur qui s’en prend à l’environnement

naturel, en fait partie et use seulement d’un droit qui ne lui appartient pas personnellement,

qu’il exerce dans une zone de sécurité collective et magique, originellement délimitée

et du reste préservée par des actes de compensation sacrés. Ce n’est pas l’âge d’or.

Cependant, Rousseau nous aide à comprendre pourquoi, entrant dans les cavernes, nous

pouvons être sous un charme, mais restons libres de toute exaltation héroïque. C’est que,

là, ne vécurent jamais de héros.

L’apparition du héros marque un changement des rapports avec la nature. Il y a

Hercule, il y a Achille, il y a Roland, il y a le Cid ou Horace. Cette énumération nous dit

presque tout. A l’âge des contes subsiste avec la terre ou le ciel une connivence malicieuse

qui n’est pas unité, mais suppose un horizon commun : nous ne sommes presque jamais

dans le vertical, mais dans l’horizontal, et l’homme, s’il combat contre les êtres des divers

règnes naturels, ne les combat pas par une claire action guerrière, mais par la ruse,

l’échange malin ou une transformation magique qui lui permet de prendre en charge la

vérité et le savoir des puissances adverses. Hercule s’oppose à la nature d’où il émerge,

monstrueusement, mais par la force ; toutefois, ses exploits sont des entreprises, on dit

même des travaux — ce qui rend sa situation équivoque. Hercule n’est pas un héros solaire,

il est trop fort, cette force n’est pas virile ni divine, elle est naturelle, elle est la nature

se séparant puissamment d’elle-même : il y a quelque chose de triste chez Hercule,

comme s’il représentait une sorte de trahison, la part où la grande nature renonce à sa

grandeur, mais, maîtrisée, nous prive de ce savoir enchanté que nous donnait l’acquiescement

à ses apparences monstrueuses. La puissance domestique la puissance et se fait

servile. Il est curieux que Chiron, le centaure, soit porteur d’une sagesse et Hercule,

l’homme, porteur d’une brutalité. Et précisément Chiron n’est pas un héros.

Le héros combat et conquiert. Cette virilité conquérante, d’où vient-elle ? De luimême.

Mais lui-même, d’où vient-il ? Voilà le début de ses difficultés. Il a un nom qui lui

est propre, qu’il s’est même souvent approprié — un surnom, comme on dit un surmoi. Il

a un nom, il est un nom. Mais s’il a un nom, il a une généalogie ; l’ascendant qu’il exerce

et qu’il doit à ses hauts faits est en même temps le signe de son ascendance, cela qu’il doit

à son origine et qui le fait venir naturellement de haut. De cette contradiction, il ne se

libérera pas. Héros qui ne doit rien qu’à lui seul, il est par là divin, mais, par là, à jamais

et depuis toujours dieu, et ce n’est plus son action qui est glorieuse, c’est l’essence glorieuse

qui s’affirme et se vérifie dans ses actes, se consacre et se dénonce dans son nom. En

cela, le héros nous apprend quelque chose. D’abord l’invincible penchant essentialiste : le

héros n’est qu’action, l’action le rend héroïque, mais ce faire héroïque n’est rien sans

l’être ; seul l’être — l’essence — nous satisfait, nous rassure et nous promet l’avenir. C’est

que l’ignoble obscurité fait peur. La gloire est suspecte, si elle vient de la nuit. Il faut donc

que l’acte héroïque soit toujours déjà antérieur à lui-même, de même que le héros, l’homme

premier par excellence, doit être un homme venu de loin, une merveille héréditaire,

reçue et transmise. Achille, caché et travesti en fille, est cependant déjà Achille. Il l’est

par son origine qui est divine, et l’attente où il est de lui-même est l’attente seulement de

sa manifestation. Non pas inconnu, mais dissimulé : cette occultation, d’un coup, cesse et

le voilà dans le plein jour, de part en part visible, porteur d’une clarté qui ne triomphe

pas seulement de la nuit, mais la niait par avance et faisait d’elle déjà un jour à venir. [...]

Le héros n’est rien s’il n’est glorieux. Le mot exploit marque cette relation avec le

dehors, l’héroïsme ignore le for intérieur, comme il ignore le virtuel et le latent. La gloire

est le rayonnement de l’action immédiate, elle est lumière, elle est éclat. Le héros se montre,

cette manifestation qui éblouit est celle de l’être dans un être, la transfiguration de

l’origine dans le commencement, la transparence de l’absolu dans une décision ou une action

pourtant particulières et momentanées. Mais cette découverte glorieuse qui à la fois

ne laisse rien à découvrir (l’âme du héros est la plus vide) et se prétend inépuisable, est

le privilège de son presque homonyme, le héraut, celui qui annonce et fait retentir. L’héroïsme

est révélation, cette brillance merveilleuse de l’acte qui unit l’essence et l’apparence.

L’héroïsme est la souveraineté lumineuse de l’acte. Seul l’acte est héroïque, et le

héros n’est rien s’il n’agit et n’est rien hors de la clarté de l’acte qui éclaire et l’éclaire.[...]

Il en résulte que l’authenticité héroïque — s’il y en a une — devrait se déterminer comme

verbe, mais jamais comme substantif. Or, au contraire, seul compte, seul importe le héros

dans la plénitude du nom. Cela signifie aussi que s’il n’y a d’héroïsme que dans l’action,

il n’y a de héros que dans et par la parole. Le chant est son séjour privilégié. Le héros naît

quand le chanteur s’avance dans la grande salle. Il se raconte. Il n’est pas, il se chante

seulement.

Le héros, l’homme actif par excellence, ne doit son être qu’au langage. Mais il faut

tout de suite remarquer qu’entre l’aède errant et l’homme puissant sans pouvoir et sans

site, il y a une complicité de destin et une similitude de fonctions (l’on vante Roland plutôt

que Charlemagne). C’est que tous deux sont en marge ou du moins représentent une présence

à la fois frontale et latérale. Le chanteur se reconnaît — de loin — dans le héros et,

par là, pense se faire reconnaître en le proposant à la reconnaissance. Non pas que le poème,

en racontant l’action merveilleuse, se contente de la célébrer : la célébrant, il la produit,

il la répète au sens le plus fort ; il lui accorde ce pouvoir de redondance qui vient du

nom et se déploie dans la renommée, cette rumeur de gloire accompagnant le nom. Il

n’existe pas de héros obscur. « L’honneur, dira Pindare, va seulement à ceux dont le dieu

fait croître un beau logos venu au secours des morts.» La parole mesurée et la démesure

héroïque ont ceci de commun : l’une et l’autre affrontent la mort. Mais la parole est plus

profondément engagée dans le mouvement de mourir, puisque seule elle réussit à en faire

une vie seconde, durant sans durée. En ce sens, et en admettant que le héros soit le maître,

l’homme qui semble détenir la parole comme un pouvoir sera le maître du maître.

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